Chroniques de Metallah : chapitre 2
Chaque semaine je vous proposerai ici un chapitre d’un bouquin en cours d’écriture/correction .
A vous de faire vos commentaires, propositions, corrections, en espérant que cela vous plaira : plusieurs tomes sont d’hors et déjà programmé.
L’univers de Metallah, que j’ai imaginé, a été utilisé pendant 5 ans pour un jeu de rôle par email dont j’ai été le maitre du jeu.
Le 1er tome se déroule plusieurs siècles avant le « début du jeu » : certains tomes relateront les aventures des principaux acteurs/joueurs de ce jeu…
Chapitre 2 :
L’Empereur se réveillait. Une lumière aveuglante illuminait son lit. Il essaya de tourner la tête, à gauche puis à droite. Une ombre indéfinie parcourait la chambre
« Que s’est-il passé ? murmura-t-il
– Rien, rien… Vous êtes arrivés au palais épuisés et vous vous êtes évanouis à l’entrée répondit une voix que ne reconnaissait pas l’Empereur
– Où sont les autres ?
– Ils se reposent, ils ne sont pas encore réveillés
Le souverain essaya en vain de se lever, son corps était trop lourd, il ne sentait plus ses jambes et ses yeux ne voulaient rester ouverts. Il distinguait dans la lumière éblouissante une grande et mince silhouette qui effectuait des aller-retour tout en lui parlant. Le timbre de la voix était déformé par la fatigue et l’empereur n’arrivait pas à distinguer le visage de l’individu.
– Je viens voir la Matriarche
– La Reine vous recevra quand vous et vos compagnons seraient reposés. Il faut que vous dormiez, vous êtes faible, trop faible.
L’Empereur séduit par ces conseils se laissait aller. Mais, il devait se lever et voir au plus vite la Matriarche, il devait résister à la tentation de dormir.
– Il faut dormir, vous vous sentirez mieux après cela
– Non, nous sommes pressés, il faut que…
– Oui, il faut que vous dormiez… Dormez… »
L’Empereur ne put résister.
« Maître ? Maître ?
– Oui ? fit Mapuelo qui se réveillait doucement.
– Vous vous sentez bien ?
– Oui… Où sommes-nous ?
– Sur Nekkar.
L’Empereur ouvrit un peu mieux les yeux et se tourna. Le soleil venait de se lever, illuminant toujours le lit. Il avait révé. Pourtant tout avait semblé si réel.
– Il y a longtemps que nous sommes là ? demanda-t-il au chef des gardes qu’il reconnut alors
– Non, depuis hier soir, répondit Xiker
– Il y avait quelqu’un dans la chambre fit le souverain perplexe. Il ou elle m’a dit que vous dormiez…
– Personne n’est entré dans cette chambre depuis hier soir, je me suis chargé de notre sécurité
– Il faut que je vois la Matriarche!
– J’ai demandé un entretien, fit Xiker. Elle nous recevra après le petit déjeuner.
– Bien. Allons manger donc! »
L’Empereur se leva et se prépara tout en repensant à cet étrange rencontre. Était-ce finalement bien un rêve ? Cela avait l’air si réel. Qui était-ce ? Il essayait de se souvenir du moindre détail mais il finit par se résoudre au fait qu’il avait tout simplement révé.
Xiker attendit un instant observant son maitre s’habiller. Il vieillissait de jour en jour, ses cheveux crépus grisonnaient virant peu à peu vers le blanc et ses tempes se dégageait. Pourquoi avait il l’air si inquiet ? L’Empereur avait dit qu’il avait vu quelqu’un dans sa chambre mais pourtant personne n’avait pu y pénétrer, il s’en était assuré. A son réveil Xiker avait immédiatement demandé à voir la Matriarche. Bien que extrêmement méfiant à l’égard des ghuls il n’avait rien décelé d’anormal. Il avait vérifié par lui même que tout les gardes, puis l’Empereur et son fils en particulier n’avaient subi aucun trouble. Il avait préparé un entretien auprès de la Matriarche pour leur réveil et s’était assuré qu’ils puissent déjeuner en sécurité. Il avait même vérifier la qualité de l’alimentation. Après tout cela il avait veillé pendant pratiquement une heure auprès de son Empereur. Son maître paraissait troublé par son rêve.
Ils rejoignirent leurs amis dans la salle à manger où ils l’attendaient pour commencer le repas. La table débordait de mets locaux. La scène semblait irréelle, les ghuls paraissaient étonnamment accueillant. Mapuelo se demanda alors s’il ne révait pas encore une fois.
« Père, vous semblez troublé ?
– Ce n’est rien mon fils! Mangeons! »
Xiker prit un aquaphage et le mit dans son assiette. Il était beaucoup plus petit que celui rencontré dans la forêt. Le chef de la garde personnelle de l’Empereur appréciait ce met délicat au gout comparable aux huîtres. Il l’avala sans le mâcher, le gobant. Les autres gardes se jetèrent sur ce que l’on pourrait considérer comme le caviar local : les yeux d’Argos appelé Panoptès.
L’Argos était un animal très rare originaire des marécages de Nekkar. Ce petit mammifère d’un pied de long possèdait plus de cent yeux de quelques millimètres de diamètre. Très craintif sa capture relevait souvent de l’exploit. Ses yeux, ou Panoptès, étaient très appréciés dans tout l’Univers.
L’Empereur et son fils moins gourmand mangeaient tranquillement la cervelle d’un Henuic, petit animal sans poil à l’énorme tête, de la taille de son corps. Semloh échangea un bref regard avec Xiker pour lui faire remarquer la tenue du dauphin. Le chef des gardes pour une fois s’en amusa et sourit. Ahron avait décalé des boutons en s’habillant, sa chemise bleu à fines broderies blanches se froissait ainsi.
Les plats passaient de mains en mains, devenant plus légers puis finissaient entassés. Il n’y avait pas seulement de la nourriture dans les plats mais partout, y compris sous la table. Les ordures et les restes envahissaient la salle pendant que les mains grasses des voyageurs bougeaient dans tous les sens, se passant les plats, trinquant ou amenant de la nourriture à la bouche de leur propriétaire.
Les voyageurs ne prétaient même plus attention aux quelques ghuls gardes qui les observaient, d’un air satisfait, à quelques pas. Ils étaient comme chez eux, bien et serein, confiant. Même l’attention de Xiker se relâchait quelque peu, il appréciait la nourriture offerte et oublia pendant quelques instants qu’il était chez ses ennemis de toujours. Néanmoins à deux reprises le chef des gardes se ressaisit et fut troublé par la vitesse à laquelle ses camarades engloutissaient la nourriture comme si de rien n’était, apparemment sans complexe. Mais l’ambiance confiante et légère, presque insouciante, l’incita à se replonger dans les mets délicieux qui s’offraient à lui.
La table se vidant de nourriture, se remplissait de restes et d’ordures. Les assiettes et plats vides s’empilaient les uns sur les autres, formant des tours derrière lesquelles disparaissaient les voyageurs. Les mets chers et délicats faisaient place aux ordures et os, aux assiettes sales et liquides gras et visqueux.
Les voyageurs, repus, s’affaissaient sur leurs chaises. Ils étaient bien. On apporta alors à boire de la liqueur de lait de Veptu pour digérer tout cela.
« La Reine Mère est prête à vous recevoir !
La voix résonna dans la salle comme un gong, les interrompant. Un garde était entré sans bruit dans la salle à manger et attendait les voyageurs. Tous le dévisagèrent, les gardes de l’Empereur auraient préféré digérer un peu avant, ils se sentaient un peu lourd après ce festin. Le chef des gardes se redressa sur sa chaise un peu honteux de leur attitude.
– Nous te suivons »
Ils marchèrent pendant quelques minutes derrière lui, sans dire un mot. Le Prince remarqua les décorations sur le plafond de ce couloir. De fines gravures et des dessins peints dansaient au-dessus de leur tête. Ces peintures évoquaient des légendes locales. Celles de monstres mythologiques, comme le gigantesque serpent nommé Anguila, un serpent qui, d’après la légende, vivait caché dans les forêts de Nekkar et en sortait quelquefois pour attraper les jeunes ghuls.
Le garde s’arrêta finalement devant une porte, semblable à celle de l’entrée du palais, plus petite, mais tout aussi terrifiante. Le ghul posa sa main doucement sur la porte qui s’ouvrit. Derrière, une épaisse fumée semblable à un brouillard dense et laineux commençait déjà à sortir de la pièce. Il leur fit signe d’entrer.
« Cher Empereur, fit une voix enrouée, je suis là, venez à moi, je ne puis me déplacer…
– Turan, Reine des Ghul, c’est vous ? fit l’Empereur pénétrant le brouillard ambiant
– Oui, approchez mes chers »
Ahron réalisa que la voix venait d’une grande baignoire au fond de la salle, ils s’approchèrent. Quelque chose flottait dans le liquide de ce bain, de nombreuses bulles apparaissaient et disparaissaient, l’eau semblait bouillir.
« C’est moi, cher Empereur!
La voix sortait de l’eau, faisant de nombreuses bulles…
« Je sais, j’ai beaucoup changé. Malgré ma force le corps que j’ai parasité est devenu flasque et mou, je suis navrée de me présenter à vous ainsi.
– Ce n’est pas grave, fit l’Empereur, je…
– Approchez, je ne vais pas vous manger! »
Les visiteurs approchèrent de la baignoire où le parasite Ghul flottait, mou, tel une méduse, agrippé au corps qu’il avait parasité. La chevelure noire et grasse d’une femme d’Hadar courrait aussi sur l’eau, s’étalait à sa surface accompagnant le parasite et ne cachant qu’à peine le corps immonde parasité par Turan. C’était une grosse femme, on l’apercevait à peine sous l’eau. Le corps semblait mort, en décomposition, d’une telle blancheur macabre qu’il fit frissonner le jeune Prince abasourdi. La peau suintait d’un mélange de sueur et de graisse.
Le Prince blêmit, horrifié par cette vision. Mais aussi tellement stupéfait qu’il ne pouvait détacher son regard de la baignoire. Ce parasite horrible s’agrippait à un corps qui n’avait plus rien d’humain. La carcasse de la femme remplissait cette grande baignoire circulaire finement gravés de visages hurlants.
« Nous sommes venus parce que la Porte de votre planète ne répond plus
– Je sais!
– Vous n’avez pas essayé de nous avertir pour autant ?
– Cela fait plusieurs jours que la Porte fait des siennes, elle se déclenche toute seule ou refuse de fonctionner
– Comment avez-vous su que nous venions ?
– Quelqu’un de chez vous m’a prévenue
– Comment se fait-il qu’il ait réussi à vous avertir alors que la porte ne marchait pas ?
– Il n’a pas utilisé la porte, il a fait la même chose que vous il est venu me voir
– Qui est-ce ? Il est encore là ? Demanda perplexe l’Empereur
– Il est parti quand vous êtes arrivé. C’est un Trolenfar, il est déjà venu ici il me semble, il y a quelques temps.
– Un robot ?
– Non, un vrai Trolenfar, un androïde rebelle. Ce doit être un scientifique qui travaille chez vous. Les Sculpiens, je veux dire les non androïdes acceptent le Traité ?
– Oui. Les deux camps ont très bien accepté le traité.
– Plus d’attentats, plus de meurtres…
– Je crois que c’est la paix cette fois. Tout nouveau robot construit sur Sculp est considéré comme esclave sauf un sur mille qu’ils doivent nous envoyer. Les Trolenfars sont libres et en contre partie doivent travailler un tiers de leur temps pour nous.
– Bon est-ce que vos Érudits ont trouvé quelquechose pour réparer cette porte ? Interrompit Xiker qui n’était pas dupe du jeu des ghuls qui avait su détourner la conversation
– Nos savants Ghuls n’ont rien trouvé pour l’instant, ils ne connaissent pas assez votre technologie des Portes.
– Un problème de générateur, intervint le fils de l’Empereur
– Il n’est pas sot votre fils. Mais nous y avons déjà pensé, rien de ce côté là.
– Il faudrait que nos sages ou nos autres gardiens de Portes viennent voir sur place, continua Ahron.
Xiker trouva l’idée interessante, le prince avait certainement raison mais les faire venir chez les ghuls se révélait peut être trop dangereux. Les Sages étaient de grands voyageurs et des scientifiques. Mais avant tout étaient les conseillers et les ministres de l’Empereur. Ils se réunissaient régulièrement en Conseil pour décider de l’avenir de Métallah. Ils détenaient véritablement le pouvoir de l’Empire mais surtout son savoir. Le jeune prince s’étonnait d’ailleurs beaucoup que son père ne les ait pas amené avec lui.
« Il n’est pas bête du tout, il est prêt à vous succéder cher empereur plaisanta Turan
– Trop naïf et trop jeune, mais il a raison, il faudrait que nos sages viennent voir sur place. J’espère tout de même que ce Trolenfar n’a rien à voir avec cette panne.
– Je ne pense pas, répondit Turan, mais tout est possible bien entendu, vous pensez à un acte terroriste ?
– J’espère que non, fit Mapuelo tout en regardant Ahron qui semblait des plus perplexes. Mais j’aimerais tout de même pouvoir observer cette Porte !
– Nous y allons. Gardes, que l’on nous escorte !»
A ce moment, une trentaine de gardes entrèrent dans la pièce. Quatre d’entre eux soulevèrent la baignoire et la portèrent. Le cortège sortit de la salle. Les voyageurs suivirent la baignoire. De chaque côté les gardes les accompagnaient, les entourant comme un mur infranchissable. Le Prince regardait la baignoire qui devant lui se balançait tel un bateau. Il fermait les yeux à chaque fois que du liquide débordait un peu, de peur d’apercevoir le corps de Turan tomber, flasque sur le sol, les cheveux sombres et gras s’étalant sur la peau plissée par la graisse de l’immonde femme. Le cortège était bien gardé, que craignait donc la Matriarche sur sa planète ?
Ahron avait entendu dire que depuis quelques temps certains systèmes en place étaient contestés et que quelques groupes anarchiques se formaient çà et là. Peut-être la panne était-elle due à un sabotage. Le Prince malgré son amour pour son père avait bien vu que celui ci était fatigué tout comme son Empire. Depuis quelques années chaque système semblait vouloir faire à sa guise et le pouvoir de l’Empereur affaibli n’y pouvait plus grand chose.
«Vos gardes devraient aller se reposer. Et votre fils n’a pas besoin de nous accompagner. Il peut s’il le souhaite visiter le jardin du palais cela sera plus intéressant pour lui
– Je peux père ? Interrogea Ahron en regardant son père. »
Voyant que Xiker ne semblait visiblement pas approuver sa demande le jeune prince espérait que son père accepte malgré tout. Mais le chef des gardes après un instant de réflexion sembla céder finalement avant même que l’Empereur ait approuvé.
“Je l’accompagne, vous autres allez vous reposez, la Matriarche a raison !
– Allez y ! confirma l’Empereur, les gardes de Nekkar suffisent bien. »
Les gardes bien que perplexes mais aussi un peu ballonnés depuis le repas, partirent de leur côté accompagnés d’un des gardes de la Matriarche en direction des chambres du palais.
L’Empereur et la Matriarche continuèrent leur chemin jusqu’à la petite colline derrière le palais où se dressait la Porte de Nekkar.
De leur côté, le fils de l’Empereur et Xiker, accompagné d’un autre garde de Nekkar se dirigèrent vers les jardins du palais. Ahron s’étonnait finalement beaucoup de la décision de Xiker. Le chef des gardes aurait certainement préféré surveiller la conversation qu’allait avoir son Empereur avec la Matriarche. Mais le Prince remettait toute sa confiance entre les mains de Xiker, il avait prouvé à de nombreuses reprises dans le passé qu’on pouvait compter sur lui.
Pourtant, le chef des gardes regrettait déjà sa décision. Elle avait été rapide mais éloigner ce jeune héritier de son père était peut être une bonne chose. Il connaissait Ahron, garçon intelligent et influent. Trop parfois car sa naïveté était souvent imité par l’Empereur devenu faible avec le temps. Une fois de plus il avait réussi à faire céder son père. Visiter des jardins, quelle idée saugrenu. Mais au moins il n’irait pas parasiter les décisions de Mapuelo. Faire venir les Sages sur Nekkar, le jeune prince était décidément trop naïf. Même s’il n’allait pas pouvoir surveiller les conversations entre l’Empereur et les ghuls, il était sûr qu’Ahron n’allait donner d’autres mauvaises idées à son père.