Ecologie avenir de la gauche

Deux articles mis en parallèle pour tenter de comprendre et imaginer une rénovation. La rénovation de la gauche, mais aussi de l’écologie politique. Jean Zin que l’on situerait plutôt volontier dans les écolos révolutionnaires et Benoît Lechat de Etopia (nos amis belges : centre d’animation et de recherche en écologie politique)

Jean Zin nous parle donc de l’écologie politique comme avenir de la gauche quand Benoit nous parle d’écologie et réforme de la gauche.

Jean Zin introduit ainsi son texte :

On peut analyser de différentes façons l’effondrement des Verts aux dernières élections présidentielles : par leurs défauts internes ou les défauts de l’élection, par la faute à Hulot, à Bové, au PS, aux médias…

Certes tout cela a pu jouer mais il faut surtout rapprocher cet effondrement de deux autres faits :

d’une part il ne faut pas faire comme si la marginalisation des Verts n’était pas celle de toute la gauche (l’extrême-gauche bien sûr mais jusqu’au PS puisque les valeurs de gauche y étaient marginalisées aussi !),

d’autre part cette décrédibilisation du parti écologiste se produit paradoxalement au moment même où les problèmes écologiques commencent à être pris au sérieux par la société toute entière, y compris les partis de droite…

Il poursuit :

Si l’écologie-politique constitue bien une nouvelle façon de faire société, avec de nouveaux biens communs, le sentiment d’une communauté de destin et d’une responsabilité collective, cette solidarité sociale renforcée ne signifie aucunement qu’il faudrait nier pour autant la division de la société ni la nécessaire résistance des dominés.

Au contraire, c’est une base solide pour exiger avec plus de force encore la réduction des inégalités, pour ce qui serait une véritable écologie de gauche mais qui aura besoin d’être défendue par toute la gauche, pas seulement par une de ses composantes

Viennent ensuite un texte en plusieurs parties : l’écologie de gauche (qu’est ce ? et qu’est ce que l’écologie de droite) , la révolution écologiste (du pourquoi du radicalisme) , l’avenir de la gauche .

De son côté Benoit Lechat avec un regard plus belge fait un tour de l’écologie et de la gauche.

Il introduit ainsi :

L’écologie est-elle de gauche ? Faut-il vraiment se poser cette question aujourd’hui ?

Expliciter le rapport de l’écologie politique à la gauche implique de définir les deux termes de la relation. Il faut le faire à la fois dans une perspective historique (d’où viennent la gauche et l’écologie politique ?) et dans une perspective contemporaine

De ce double point de vue, la thèse qui sera ici soutenue est que l’écologie politique incarne la forme la plus « moderne » (c’est-à-dire la plus critique) d’une tradition politique qui a commencé avec les Lumières dans la seconde moitié du XVIIème siècle et qui a donné le jour au libéralisme et au socialisme

Mais loin de choisir un retour « réactionnaire » au monde pré-moderne, l’écologie fait le choix d’une « modernisation de la modernisation », c’est-à-dire d’une réorientation globale du mouvement émancipateur de la modernité

Il poursuit en tentant de donner une définition et une histoire à la gauche et à l’écologie :

La question du clivage gauche-droite reste-t-elle encore aujourd’hui pertinente pour identifier des enjeux politiques et les réponses à y apporter ? Les militants écologistes de 2007 qui participent aux formations organisées par Etopia sur les balises idéologiques de l’écologie semblent partagés sur la question .

Pour certains, la gauche, c’est un truc complètement dépassé et qui risque de fourrer Ecolo dans les jupes d’un PS qui, par les temps qui courent, fait souvent office de repoussoir, singulièrement en Wallonie.

Pour d’autres, un peu plus nombreux, c’est une vraie question qui permet notamment de faire sortir l’écologie de la niche environnementale et de l’interroger sur des enjeux plus larges, notamment sociaux

Paradoxalement, le clivage gauche/droite est à la fois extrêmement discriminant et très flexible

Son contenu a sensiblement évolué depuis son émergence, le 28 août 1789 lorsque les députés de l’assemblée constituante réunis à Versailles sont appelés à se prononcer sur le « veto royal », c’est-à-dire sur le droit du roi de France à s’opposer aux décisions de l’assemblée. Entre les opposants au veto qui se rangent à gauche du président de l’assemblée et ses partisans qui se retrouvent à droite, la France se divise entre une monarchie constitutionnelle et un régime absolutiste qui maintient à l’extérieur de la nation la détermination de ses normes

A l’origine, on a tendance à l’oublier ces temps-ci, les libéraux sont clairement de gauche. Ou plutôt, la gauche est franchement libérale. L’émancipation libérale passe non seulement par l’affirmation de la laïcité de l’Etat mais également par l’égalité formelle (devant la loi) et par le droit à la propriété privée.

Le socialisme émerge, lui, de la prise de conscience que cette liberté n’est accessible qu’à une minorité

Egalité-liberté : socialisme et libéralisme sont animés par le même idéal d’une société où « le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous » . Souvent, les marxistes ont lu à l’envers cette phrase célèbre du Manifeste communiste : le libre développement de tous est la condition de développement de chacun

Pour les socialistes et les sociaux-démocrates, cela requiert l’octroi du suffrage universel. Pour les communistes, la révolution et la dictature du prolétariat qui doit mettre fin à l’exploitation capitaliste du travail. Quant aux libéraux, ils sont persuadés que le libre développement de chacun et singulièrement le libre développement économique ne peut qu’être bénéfique au plus grand nombre si on lui met le moins possible de freins. Progressivement, au XIXème siècle, émerge une nouvelle version du clivage : devient de gauche la défense de l’Etat (la collectivité) comme outil de réalisation de l’égalité réelle tandis que la droite protégera la liberté des acteurs économiques contre l’emprise de la collectivité.

Alors que l’histoire se poursuit, commenté par Benoit, les écologistes vont naitre au milieu de ces clivages… Au milieu du libéralisme, du socialisme, du collectivisme, de l’etat providence et des premières crises écologiques…

Il poursuit :

Les Verts se situent clairement dans la tradition de la gauche et même, ils en incarnent sans doute la pointe la plus avancée, notamment dans la mesure où ils ont le mieux intégré l’exigence implicite qui est désormais faite à tous les êtres humains d’être responsables les uns des autres

La défense des travailleurs ne doit pas se confondre avec la défense de productions dépassées par l’évolution écologique

Il propose alors 5 débats :

Mener le débat sur le rôle du marché dans la poursuite des idéaux de justice et d’émancipation.

Laisser l’économie dans les mains complètes de l’Etat ou du marché a des effets complètements dévastateurs tant sur les êtres humains que sur l’environnement

Mener le débat sur le rôle de l’Etat dans la poursuite des idéaux de justice et d’émancipation.

L’initiative économique publique n’a pas su reconvertir. Est-ce parce que l’appareil public a été systématiquement utilisé à des fins partisanes ? Le clientélisme et le sous-localisme sont autant de facteurs d’injustice et d’inefficacité que la gauche doit être la première à dénoncer et à combattre

Mener le débat sur la consommation, le pouvoir d’achat et les biens publics

Mener le débat sur la reprise du projet démocratique

Retrouver le plaisir et l’audace de la réforme

Il ne peut y avoir de place à gauche pour des gens qui préfèrent faire échouer des réformes utiles et justes au motif qu’elles conforteraient la légitimité de l’économie de marché, comme ce fut le cas lorsque pour l’extrême gauche trostkyste, Alain Krivine s’est abstenu sur la taxe Tobin au parlement européen. La radicalité vertueuse ne sert souvent à rien d’autre que de renforcer le système qu’elle prétend mettre à bas

Mais revenons à Jean Zin

Ou plutôt : et si nous poursuivions le débat ?