Les résultats des Verts semblent bien amorcer ce que Cécile Duflot appele une renaissance. La victoire de Voynet à Montreuil est une revanche personnelle pour celle qui a dirigé les Verts pendant de nombreuses années et a été à 2 reprises candidates aux présidentielles. 32 maires Verts – 2 femmes et 30 hommes – sont sortis des urnes au lendemain du 16 mars 2008. 22 sont sortants, 10 sont nouvellement élus. Aux cantonales les Verts s’en sortent également plutôt bien même si sur la Haute Vienne il faut prendre en compte l’absence des candidats d’extreme gauche. Petit tour d’horizon…
Dans un premier temps et afin de compléter mes remarques je vous invite à lire les billets de Alain Lipietz qui revient assez habilement sur tout cela. Je retiendrais notamment ce passage :
Les Parisiens ont plébiscité la politique du tramway, des couloirs à bus et à vélo, de libération des voies sur les berges de la Seine en été, c’est à dire la politique de l’adjoint aux transports, le Vert Denis Baupin… et c’est la liste des Verts conduite par Denis qui a morflé ! Sauf justement l’excellent… maire Vert du 2è arrondissement, Jacques Boutault qui, avec environ 30 % des voix, fait presque jeu égal avec sa concurrente des listes Delanoë !
Moralité : l’autonomie des écologistes au premier tour , ça ne peut pas se faire « de temps en temps », mais presque systématiquement pour « sauver le vote à deux tours à défaut de proportionnelle ». C’est un risque, mais un risque stratégiquement indispensable. Paris paie sans doute l’absence d’autonomie des Verts aux régionales d’Ile-de-France en 2004.
Il convient tout d’abord de relativiser. A la fois les bons et les moins bons résultats. Ainsi les yeux se tournent vers la capitale. Paris où les Verts perdent de nombreux points. Certains décideront que Baupin en est le responsable avec une campagne « agressive »et quelques possibles erreurs. Notons aussi que (comme le dis un commentateur sur le blog de Lipietz) l’intérêt de la campagne des Verts Paris a quand même (surtout ?) été de dissuader Delanoë de s’allier au Modem (ce n’était pas joué à l’avance, avec la médiatisation dont Sarnez et Bayrou ont profité !)
Sauf que si à Paris les Verts passent à 6,7% (12,3% en 2001) (soit 5 pts de moins) cette baisse moins nette se remarque aussi ailleurs en France. A Lille où pourtant les Verts ont fait une campagne « moins sanglante » ils passent de 15,5 à 11,5 perdant donc 4 pts.
Les Verts obtiennent 8,19 % des voix dans les 85 villes ou ils présentaient des listes autonomes soit un peu moins sur un peu moins de villes en autonome. Des très bons résultats (notamment là où les Verts étaient jusqu’alors absents) mais aussi des moins bons comme je l’ai déjà dis.
A Limoges les Verts passent de 7,5 à 5,3 perdant donc 2 pts.
A Lille comme à Paris la participation aux exécutifs a été reconnue mais plutôt favorable aux maires sortants. Le bilan à Lille permet également de faire nettement baisser l’extrême droite de 11,5 à 5,5 % , l’UMP fait également moins bien même si il faut noter la présence du Modem (qui semble être ni nuisible au PS ni aux Verts) .
Enfin il ne faut pas être naif, en 2001 Les Verts avaient été le seul parti de gauche présent au gouvernement à améliorer ses résultats en 1999 comme en 2001 (Notons tout de même que les Verts faisaient moins bien aux européennes de 2004 qu’aux européennes de 1999) . Des déçus à gauche avaient pu préférer voter Verts plutôt que PS ou PC avant de revenir à un vote utile suite au 21 avril.
Les Verts font donc de meilleurs résultats quand ils sont présents médiatiquement et semblent « félicités » de leur participation à un exécutif.
Nous nous retrouvons finalement dans une situation où nos scores sont meilleurs qu’en 1995 et un niveau pouvant se rapprocher (en mieux) des élections de 1998 (malgré des législatives de 2007 un brin moins bonnes qu’en 1997 : droite juste élu oblige ? d’ailleurs le PC encore fort il y a 10 ans ne semble résister que par ses alliances, sa baisse profitant certainement à la LCR comme au PS cette année)
Mais nous ne sommes évidemment pas tout à fait encore au niveau de 1999, et ce alors que nous sommes absents du gouvernement et donc dans les médias.
Un retour encore plus fulgurant ? En 1995 nous faisions de mauvais scores aux présidentielles et nous revenions 2 ans plus tard. Là un an à peine est passé… Il convient donc de capitaliser aux prochaines européennes puis autres élections en démontrant la pertinence de nos alternatives.
Je pourrai reprendre un extrait du billet de Lipietz :
Au premier tour des cantonales, en effet, 20 candidats Verts obtiennent moins de 5%, mais 174 obtiennent entre 5 et 10%, 119 entre 10 et 15%, 38 entre 15 et 20%, 38 autres entre 20 et 40, et 13 au-dessus de 40% !
D’un coup, les Verts ont retrouvé leur étiage de l’époque de la « majorité plurielle ». Le « retour à 2001 » est d’une précision diabolique : pour les candidat-e-s vertes pur sucre au cantonales, le score moyen était de 11,63% en 2001, il est en 2008 de 11,54 %, et là où leur candidature était soutenue par un autre parti, la moyenne était de 21,38 %, elle est cette fois de 21,46 % ! et ce n’était pas les mêmes cantons !!
Si on s’intéresse spécialement aux résultats des listes autonomes « Vertes et ouvertes », ou aux listes d’union conduites par des Verts, on s’aperçoit que 18 font moins de 5%, 44 entre 5 et 10%, 22 entre 10 et 15%, 5 entre 15 et 20%, 15 entre 20 et 50%, et 4 maires verts sont élus dès le premier tour, dont l’un, Jean-François Caron, réélu à Loos en Gohelle (62) avec le score ahurissant de 82,1%.
Une renaissance donc… Après des bons résultats en 1999, 2001 puis 2004 (moins bons que 1999 pour les européennes)…
2005 (référendum) et 2007 auraient pu être fatale pour les Verts que l’on disait mort. Pourtant… Ils semblent bien de retour…
Un retour sur lequel il faudra miser tout en étant habile : d’autres élections arrivent rapidement dont les européennes…
Autres points à relativiser : le bon score de Voynet.
Tout d’abord il convient de rappeler que sa liste était « sans étiquette » , c’est donc une maire verte mais une liste sans étiquette. Une liste composé de dissidents socialistes, communistes, de gauche, de sympathisants (…) , une liste qui a du se battre contre une liste soutenue par le PS et le PCF.
Voynet réussit aussi un pari. Elle a été souvent accusé de « rapprochement voir souhait de fusion » avec le PS. C’est pourtant face à une liste soutenu par le PS et le PCF qu’elle a gagné.
Les sans étiquette, les listes citoyennes, les associatifs s’invitent donc dans la politique. C’est aussi l’élément à prendre en compte. Ne souhaitant plus être « Enfermé » dans une logique de parti certains misent sur les « listes citoyennes » sur les nouveaux rapports entre politiques, citoyens, associations (…) . Et ils réussissent.
Les Verts ont ici un avantage sur les autres partis : ils ont été plus d’une fois dans cette logique de collaboration avec ceux qui ne sont pas « encartés » dans un parti. La mode passagère « ni ni et et » du Modem semble bien s’essouffler aux profits des « dissidences » , « sans étiquette » , « associatif » … Et si le bipartisme est bien là avec 2 partis principaux (PS et UMP) , ils devront faire face à 3 partis arbitres en cours de « modernisation » et qui ont justement parié sur des nouveaux rapports politiques.
Pour en revenir aux cantonales sur Limoges :
Après calculs rapides pour les Cantonales
Malgré l’absence de l’EXG nous baissons partout sauf sur Limoges Cité et Grand Treuil. Mais il faut prendre en compte qu’en 2001 il y avait parfois d’autres candidats écolos.
Si l’on considère que l’on aurait pu récupérer le « cumul écolos » nous perdons partout 8 à presque 30% de nos voix suivant les particularités et enjeux du canton (sauf grand treuil que je mets à part étant donné l’absence de l’UMP) .
Corgnac / Limoges Centre : presque 30% de perte de voix (seulement 10% si on considère juste les voix Verts sur Centre) . A regarder dans le détail des bureaux. Pour Centre enjeu Marsaud (le PS y a gagné mais n’a pas capitalisé au second tour). Moins de voix exprimé qu’en 2001 pour Corgnac (le PS gagne presque pas de voix) .
Cité / Landouge : 8 à 10% de perte de voix (et hausse pour Cité si on considère juste les voix Verts). D’un coup d’oeil il semble que Barret sur Landouge soit le seul PS a baissé de quelques voix
Beaupuy / Condat : 15 à 19% de voix en moins
La petite baisse sur les cantonales semble aller de pair avec la baisse aux municipales. Baisse moindre sur Cité et Landouge où des électeurs semblent devenir plus fidèles. Mais d’une manière ce phénomène peut se remarquer ailleurs en France où souvent malgré l’absence de l’extreme gauche (ou d’autres listes) les Verts n’en ont que peu profité.
Si l’on considère les scores de 2007, l’absence dans les médias, le vote sanction favorisant plus souvent PS ou extreme gauche, les Verts s’en sortent donc plutôt honorablement. Les scores du second tour mais aussi les scores aux cantonales donnent de l’espoir.
Comme le dit assez bien Mamère : la gauche Mais surtout les Verts (qui représentent encore et toujours une nouvelle gauche qui doit se reconstruire) doivent absolument renouer avec le vote populaire.
Ils doivent également peser sur l’avenir : le PS et le Modem se font des clins d’oeil. A Paris , Les Verts ont eu aussi cette objectif, éviter une alliance PS-Modem. Les Verts doivent donc bien être le pivot qui empêche le PS de basculer vers le centre. Il faudra absolument prendre en compte les « sans partis » qui se sont exprimés pendant la campagne. Et obliger la gauche a avoir des nouveaux rapports.
A la veille de Mai 68, la SFIO avait encore de nombreuses villes. Elle reposait même sur un axe Lille – Marseille qui permettait de gagner les Congrès socialistes tout en perdant les élections nationales. Un an après, le tandem Deferre/Mendes France, en 69, faisait à peine 5 % aux élections présidentielles. Preuve que gagner localement n’est pas un gage absolu de victoire au niveau national.